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L'évaluation annuelle du stock de coquille, Saint Jacques et autres démons de la baie de Seine... |
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A nos pauvres halieutes, à nos pauvres scientifiques, à nous pauvres pêcheurs.
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Mon livre de chevet est en ce moment "L'évaluation annuelle du stock de coquille Saint Jacques de la baie de Seine". Eric Foucher son auteur nous livre là un magnifique ouvrage clair et détaillé. Malgré un style rapport de gendarmerie qui sied mal à son statut, on ne peut qu'apprécier le contenu clair et précis sans concession de l'auteur. Chaque mot y est soupesé, chaque phrase lourde de sens met chacun devant ses responsabilités.
Quel plaisir, mais quel plaisir ! "Recrutement, pré recrutement, biomasse, coquilles adultes, reliquat, facteur économique, groupe 2 et 3, exceptionnelle abondance, cohorte". Je me délecte, j'exulte, les yeux révulsés, le front humide. Négligemment le précieux ouvrage me glisse des mains et je sombre dans la volupté, me laissant aller à des rêves maritimes, je suis en symbiose avec la mer. Au milieu des océans survolant tel un condor ces plaines abyssales tapissées de cohortes d'adultes et de juvéniles, estimant d'un seul coup d'oeil cette biomasse exceptionnelle, je tombe rassuré dans un profond sommeil. Le matin, tel Saint Jacques ressuscité je me réveille le regard étincelant, illuminé par la magnificence et la promesse de générosité de ma mer adorée. J'ai l'impression d'être un grand chevalier revêtu d'une armure de coquilles, je me sens invincible, j'ai l'aplomb de celui qui a vu et compris, je déjeune et pars regagner le 6e continent.
Certains pourraient facilement penser que je masque derrière une vision poétique mes gestes assassins, qui chaque jour répétés, me font décimer, sans vergogne et dans un but uniquement mercantile, les reines des sables. Non, ma croisade est juste, je vais quérir pitance pour nourrir mes semblables.
Dans d'autres lieux où le précieux ouvrage échoue, la lecture doit y être moins réjouissante. Certaines "baronnies" prétendent ne point s'intéresser aux problèmes de marché qui n'est que celui des vils commerçants et autres OP. Leur juridiction ne serait que dévouée aux problèmes de ressources, soit !
Je me demande alors comment se fait-il que l'on puisse encore discuter, en haut lieu, de revoir la taille des anneaux. Comment peut-on encore négliger à ce point les recommandations si simples et de bon sens des hommes de science. Comment soutenir qu'il est impossible de limiter et contrôler les points de débarque. La mésentente des 2 régions, en terme de gestion, ne serait-elle pas le prétexte qui tombe à point nommé pour ne pas imposer des mesures forcément impopulaires ? Le calme à tout prix, serait-il le seul état dans lequel se complaisent nos administrations ?
Là où je m'inquiète, c'est dans le peu de considération accordée aux propos de nos hommes de science. Ils ont du mal à convaincre la profession.
Mais que fait-on de leurs recommandations ?
Quelle place, quelle écoute leur est réservée au Comité National de Pêches ou par ceux qui ont en charge les problèmes de gestion des ressources ou de l'avenir des pêcheries ?
Que va-t-on léguer aux "futures générations" comme disait Cousteau ?
Ne faut-il pas dès maintenant condamner ceux qui ont la responsabilité de ces échecs, alors que depuis des années, ils sont mis en garde ?
Qui ira expliquer cela aux jeunes patrons pêcheurs ?
Dans mes rêves les plus fous, vêtu de mon armure en coquille St Jacques chevauchant un dauphin, j'en appelle aux grands laminaires des mers de Terre, aux peuples du Creux et ceux des Eaux Variantes, aux cailloux blancs des Danemark, a ceux des contrées reculées des Baltimore et Amsterdam, que tous m'aident à pourchasser ces impies à la conscience impure jusqu'au fond des estuaires. Avec mon sabre de cosaque, je les pourfend d'un seul geste et jette leurs dépouilles à la mer, leur offrant ainsi le droit d'expier ces crimes impunis...
DR, le 11/10/05 quelquepart entre le Minot et les Mers du Nord....
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Ouverture du large 2005, 3 octobre 2005
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Donc passé ces quelques diversions venons-en aux faits historiques, au déroulement des opérations :
Cela a fait la une des journeaux télévisés et de la presse, vous le savez donc tous. Cette année on a malheureusement droit à une nouvelle toxine, le DSP. Aucune inquiétude, tout ceci est très bien surveillé et il n'y a aucun risque sanitaire à partir du moment où comme chacun le fait naturellement on ne consomme pas la poche noire, cad l'estomac de la csj.
Normalement à l'ouverture du Large on travaille dans le proche extérieur, cad au dessus de la ligne rouge, voir figure 1
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Semaine 40 : voir figure 2
Le DSP nous a repoussé au delà du 49°45 N. Le DSP, de son surno le Dino c'est une petite algue dont la csj se goinfre. Mais elle génére une toxine qui nous fout la colique...Je ne vais pas faire un cours de bio, en bas à gauche vous avez un lien vers Ifremer qui fait cela très bien et de mieux en mieux, leur site est très intéressant. Rien de bien méchant, mais pas très agréable. Dangereux pour les anciens et les bébés. Bon, des bébés qui mangent de la coquille , j'en ai pas souvent vu. Par contre les sénoirs en rafollent, "peux même les manger sans mes dents, sont moelleuses"...Oh, c'est pour rire. Hein, les vieux ! Semaine laborieuse entre une météo difficile NE et un secteur caillouteux. Les apports sont contenus, moins de bateaux, un rendement moyen. La csj se vend au traif syndical 2.35E, rien ne part au congélo. La presse locale se fait l'écho des quais et raconte des conneries, un scribouillard de la Manche Libre fait l'amalgame stupide entre la crise sanitaire et les problèmes de marché. Qu'on le jette au port ! Une communication officielle se fait attendre. |
Semaine 41 : voir figure 3
Amélioration la zone s'agrandit on descend au 49°43, on gagne dans le secteur aval du 0°33 W et dans l'amont du Méridien de Greenwich 0°00. Semaine de beau temps, le gisement près du méridien 0° se révèle extremement productif. Tsunami de coquilles à Fécamp et au Havre, la criée est débordée, 40 bateaux controlés, 40 en infraction, les lois de la République sont bafoués, c'est la Corse; l'ordre public est menacé, c'est le bordel; l'OPBN avale 160 T d'invendus. Hors criée, la csj se brade, la marchandise traine sur les quais dans les bateaux, les quotas sont au moins quadruplés; "ça part en vrille" dixit un administrateur. C'était prévu, j'avais prévenu en réunion de suivi sanitaire. Mais "on" a laissé faire. C'est honteux ! Comme d'hab, ceux qui vont souffir le plus cette anarchie, ce sont les pecheurs et mareyeurs qui tentent de s'organiser à travers les OP et criées.
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Semaine 42 : voir figure 4 Morte-eau chaleur. Chaud, beaucoup trop chaud ! Trop beau, trop beau temps ! Et vlan...On referme toute la zone jusqu'au 49°47, nous voila contraint dès lundi 17/10 à repartir dans les cailloux blancs, Cayenne comme disent les matelots. Il y aura moins de bateaux donc moins de csj, mais qui se soucie de la petite flotille cotière ?. Bon ben, la semaine 42 fut lamentable, une seule marée de coquille en début de semaine. Depuis il "vente la peste", donc on s'est remis au poisson, mais cela mord pas dure.
Semaine 43 : du vent, toujours du vent, sur le front du DSP pas vraiment de changement quoi qu'on note une amélioration avec une diminution de concentration dans l'eau. Les mêmes mesures sont reconduites. La carte reste la même : figure 4
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Semaine 44 : voir figure 5, du vent, toujours du vent, sur le front du DSP on ouvre une petite enclave dans l'Ouest bouée de sauvetage inespérée pour la flotille, par le Nord la limite est remontée. Le temps est toujours aussi doux 16 à 17° la nuit du jamais vu au mois de novembre, conclusion les algues prolifèrent et on assiste à des blooms un peu partout de façon désordonnée. Horreur, malheur, on note aussi la présence de DSP en Baie de Seine.
Semaine 45 : voir figure 6, il semblerait que la "piaule" de la semaine dernière ait clouté la flotille à quai, certes, mais aussi provoqué une hécatombe dans les colonies de dinophysis. A priori, plus rien dans l'eau et les coquilles seraient quasi nickel, les souris qui servent à faire par injection les tests de toxicité sont restés en pleine forme. on dit même qu'elles se seraient mise à copuler...A cette coquille, on est loin d'en connaitre tous les bienfaits, une petite injection de broyats et on se prend pour Rocco...Dans les labos à la station Ifremer de Port, on était en liesse. La prudence et le cadre réglementaire voulant qu'il faille 2 semaines de bons résultats pour ré-ouvrir on verra cela la semaine prochaine. En attendant la météo c'est toujours du vent, j'ai la nette impression que d'ici l'ouverture de la Baie on est pas pret d'avoir peché tout le proche exterieur. le mieux serait donc de le fermer jusqu'a l'année prochaine !
Peut-on vraiement parler de crise sanitaire ? Il y a bien un problème de DSP, mais comme les consommateurs locaux ne mangent pas l'hépato-pancréas, la "poche noire", donc le risque de pandémie est inexistant. Le risque, c'est la crise de marché, comme pour la grippe aviaire. Une médiatisation exagérée et tapageuse qui flingue le marché, où chacun dans les ministères et administrations cherchent à briller en assurant les pauvres citoyens que tous les moyens sont mis en oeuvre, contre un risque virtuel. La preuve en a était faite la semaine 41 où toutes les coquilles pêchées pendant cette semaine de curée étaient touchées par le DSP, personne n'a été malade, quoique avec les retraits destructions massifs de lots de coquilles "pourries", car elles avaient pris un coup de chaud, le risque était beaucoup plus grand qu'avec le DSP. Mais, à Paris, en haut lieu, dans les services vétérinaires on ne voit pas cela du même oeil et sachant qu'aucun haut fonctionnaire n'assumera un quelconque risque. Pourtant, je l'ai dit et le répète des précédents existent, le hareng de la Baltique. Ces pauvres bêtes sont contaminées par la dioxines, en quantité infine. Il faudrait en manger matin, midi et soir pour avoir un risque d'etre atteint d'une maladie due à cette saloperie qui n'a rien de naturelle. La CE a donc dans sa grande sagesse, laissé pêcher, mais interdit toute exportation de ces délicieux hareng. Mais pourquoi, au lieu d'affoler circuits de distribution et consommateurs, ne prend-t-on pas les mêmes mesures ? En France personne ne mangent la poche noire, les détaillants peuvent aussi faire passer l'info. Certains foies de poisson, notamment des squales, sont toxiques. On n'a pas pour ça interdit leur pêche et commercialisation. Il convient de traiter la coquille comme le steak de chez Leclerc avec une traçabilité parfaite. Vu lles différents modes de debarquements, ventes en criée, de gré à gré, en direct, en chéque, en liquide, en grain de sel, en échange de bons procédés, en troc, entières, en noix, petites, cassées, livrées, ou au cul du bateau, avec ou sans étiquette "sanitaire", on aura un peu de difficulté à assurer "la traçabilité" et puis je connais pas beaucoup de pecheur qui ont un terminal carte bleue...Enfin en attendant mieux on met sur le sac, le coffre, la palette ou le billot une étiquette magique qui indique, par un simple n° le lieu de peche, le mareyeur fait des petites croix sur une carte et joue à la bataille navale.
On aurait pu le faire par SMS surtaxé, ce qui aurait était une véritable "cantérinade"...n'est-ce pas M. l'Administrateur ;o))
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